Jeu de société et piratage

Je n\’ai jamais eu l\’occasion d\’en parler ici mais depuis quelques années, je suis devenu un \ »gros\ » joueur de jeux de sociétés. J\’y consacre entre une et deux soirées par semaine. Le sujet de ce blog étant davantage axé autour de sujet tels que le libre, le partage de la culture ou la neutralité des réseaux, je me suis lancé dans une petite analyse liant ces domaines. En particulier, j\’ai décidé d\’évoquer le jeu de société et le piratage. Ce texte est surtout une question ouverte pour amener le débat.

\"\"Le jeu de société est en plein boum. Il suffit, pour s\’en convaincre, de voir le succès de plate-formes comme TricTrac d\’une part mais aussi de constater que les rayons des grandes surfaces et des librairies type Cultura se remplissent de titres aux noms plus évocateurs pour les joueurs que le Monopoly. Au Cultura de Bègles, à côté de Bordeaux, on trouve Catane, 7 Wonders et ses extensions, Mr Jack ou encore Augustus ou L\’Âge de Pierre. C\’est un fait, le jeu de société comme je l\’aime se démocratise et c\’est tant mieux.

Pour appréhender le jeu de société par un autre angle, je souhaite évoquer la notion de bien culturel au sens large. Quand on parle de bien culturel exploités par la fameuse \ »industrie de la culture\ » (je hais ce terme), on évoque en général les créations musicales, cinématographiques, littéraires. Depuis peu, le jeu vidéo est aussi considéré de la même manière. Le jeu de société moderne, lui, tend aussi à rejoindre cette masse de biens culturels. Et c\’est bien normal! Les jeux récents débordent d\’imagination dans leur concept, proposent des graphismes très travaillés, des mécaniques originales. C\’est un secteur en effervescence dynamisé par une forte activité créative.

On a donc un domaine qui attire de plus en plus les foules, qui sait se montrer attractif et qui, fatalement, est géré par des sociétés de plus en plus importantes. Ça n\’a rien de péjoratif. C\’est un fait. Si on compare l\’Asmodée d\’il y a quelques années à l\’entreprise actuelle, on verra certainement une courbe d\’évolution fortement croissante. Dès lors, la tentation de rentabiliser au maximum le secteur est inévitable. La vente de CD/DVD en est un parfait exemple : des prix tirés vers le haut pour des coûts de fabrication/production/édition/etc bien moindres (même parfois inutiles à l\’heure du tout numérique). J\’ai l\’impression que c\’est en train de changer mais trop tard. Le piratage, même si je préfère parler de partage non-marchand de la culture mais c\’est mon côté libriste, s\’est développé. Quel rapport avec le jeu de société me direz-vous? Justement, j\’y viens. Pour le moment, le secteur n\’est pas concerné. Mais il serait utopique de croire qu\’il ne le sera jamais. L\’impression à domicile coûte chaque année de moins en moins cher. L\’impression 3D est déjà très fonctionnelle et promet d\’investir nos bureaux sous peu. Les outils qui permettront de copier les jeux de société seront bientôt là. Ce n\’est pas pour demain et j\’ai conscience que j\’aborde ce sujet prématurément mais il me semble important d\’en parler et d\’en débattre. J\’ai conscience que le jour où on pourra imprimer son Agricola soi-même, pour une qualité identique et un prix moindre, est loin d\’arriver. Je ne suis même pas convaincu qu\’il arrivera un jour. Cependant, les extensions des jeux ne seront peut-être pas épargnées si longtemps que ça…

Et on arrive à ce qui m\’a donné l\’idée d\’évoquer ce sujet. On est beaucoup ici ou ailleurs à pirater. Avec plus ou moins de mesure mais on le fait pour une majeure partie d\’entre nous. Il est frappant de voir que quelques jours après la sortie du dernier épisode de Game Of Thrones, on peut déjà en discuter avec beaucoup de monde. Bref, d\’un côté il y a ce comportement, cette habitude (l\’objet ici n\’est pas de débattre de si c\’est bien ou mal :-)) et de l\’autre des outils de plus en plus perfectionnés et accessibles. Et justement… L\’autre jour, je suis passé chez Descartes à Bordeaux. Excellente boutique de jeux d\’ailleurs. En fouillant un peu dans les dernières nouveautés, une extension pour Dungeon Petz a attiré mon attention. Le contenu de cette boîte pourrait être évalué en terme de volume de matériel à un tiers maximum de la boîte de base. Pourtant, là où j\’avais acheté Dungeon Petz à 45€ cette boîte est vendue 30€. C\’est à ce moment-là que je me suis fait cette remarque : n\’y a-t-il pas moyen de le faire soi-même? J\’ai immédiatement écarté cette possibilité. Trop compliqué avec les moyens actuels, suffisamment de respect pour les auteurs, éditeurs ou distributeurs et enfin, j\’aime trop l\’objet \ »jeu de société\ » pour oser me lancer là-dedans. Mais à vrai dire, là n\’est pas la question. Le problème est que ça me soit venu à l\’esprit. La problématique du prix (et de la pertinence) des extensions a déjà été soulevé mainte et mainte fois. Je ne souhaite pas alimenter ce débat là. Je sais bien que fabriquer un jeu coûte beaucoup d\’argent. Non, ce qui m\’interpelle c\’est la stratégie générale du secteur. Cette petite anecdote m\’a fait me demander si \ »l\’industrie du jeu de société\ » avait conscience que le phénomène qui touche le disque ou le cinéma allait certainement arriver plus vite qu\’on ne le pense au jeu. C\’est une question de point de vue, mais je considère pour ma part qu\’une grande partie des \ »pertes\ » (c\’est très relatif…) dénoncées par ces vieilles industries de la galette en plastique sont à mettre à leur crédit. Ils ont vu arriver le phénomène il y a bien longtemps et n\’ont pas su ou voulu évoluer pour s\’adapter aux habitudes modernes. Qu\’en est-il du jeu de société? Comment les entreprises du secteur envisagent-elle d\’anticiper ça? Suis-je trop parano?

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Les jeux cités dans ce post sont tous très bons. Je vous mets donc en lien les fiches correspondantes chez TricTrac

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Crédits : [logo] Visual Pharm – http://icons8.com/

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